mercredi 22 octobre 2008

Le Voisin

Sur mon palier se trouve une et une seule autre porte en plus de la mienne. Derrière cette porte habite mon voisin. J'avais déjà rencontré mon voisin une fois dans l'ascenseur, nous n'avions échangé aucune parole sauf un goodbye me sortant spontanément à la place d'un hasta luego au moment de se quitter (la preuve de mon bilinguisme en anglais, le sentiment inconscient de ne pas avoir affaire à un espagnol, ou tout simplement la confirmation d'un niveau zéro dans la langue de ce pays?). Et puis plus rien pendant longtemps; de temps en temps le bruit de la porte d'en face qui se ferme, les volets roulants de la terrasse qui s'ouvrent et les jours de beau temps des voix de conversations téléphoniques en espagnol arrivant jusqu'à ma terrasse et qui se voulaient être la preuve de son hispanité. Puis un jour, sur la porte d'en face, une affiche punaisée portant ces mots:
"Ich wünsche dir Herzlichen Glückwunsch zum Geburtstag, meine Liebe!"

En bon détective privé que je suis, j'ai pu déduire au moins cinq choses de cette pancarte imprimée de rouge:
Primo, il semblerais que mon voisin possède un ordinateur et une imprimante!
Deusio, il va bientôt y avoir un fête dans l'appartement d'en face!
Tercio, mon voisin aurait-il une liaison avec quelqu'un?
Quatro, j'ai quand même un doute quand à la nationalité espagnole de mon voisin!
Cinquio, je suis même prête à mettre ma main à couper qu'il est Allemand!

Je savais bien qu'il y avais un truc qui clochait. Bon, alors, oui, je sais, on va me dire que tous les espagnols ne sont pas bruns avec de la moustache, mais en même temps un blond aux yeux bleus vivant dans l'Altorreal a, statistiquement parlant, environ 5% de chance d'être espagnol! Donc si vous aviez eu à parier sur sa nationalité, à la lumière de ses quelques indices, je pense pouvoir affirmer que vous n'auriez pas choisi Espagnol (pour ma part j'étais partie sur un Suédois). Bref en tout cas, j'ai peu de chances de le voir sonner un jour à ma porte. Les jours ont repris leur cadence habituelle, les portes qui se ferment, quelques bruits de talons sur le palier, de très légers bruits de voix à travers le mur... jusqu'à ce soir!

Mais que s'est-il passé ce soir, vous vous demandez? Je dois avouer que j'aimerais beaucoup vous faire patienter. Je vous tiendrai bien en haleine jusqu'à un prochain article, mais la proximité des vacances (dans deux jours exactement) et mon retour sur Toulouse pour cette période,me suggèrent d'être raisonnable et de ne pas vous laissez vous tourmenter pendant une semaine. Sinon j'en connais certaines qui ne vont plus dormir et attendre devant leur ordinateur jour et nuit un indice salvateur. Je choisis donc de vous conter la petite histoire de la soirée.

Voici donc ce qui s'est passé ce soir:
Il est environ 20h15, je regarde les informations françaises sur France 2, histoire de ne pas être surprise à mon futur retour en France par les nombreux changements opérés par notre cher gouvernement adoré et notre merveilleux président durant mon absence (le cirage de pompe c'est pour ne pas me retrouver sur le fichier EDWIGE dans quelques années). Bruits de voix dans le couloir, normal, comme tous les soirs de la semaine les gens rentrent chez eux. Deux personnes semblent discuter sur le pas de la porte mais je n'y prête pas attention. Le temps passe quand je m'aperçois que les voix résonnent encore dans le couloir. La situation durant, la question se pose de savoir pourquoi les deux personnes ne rentrent pas dans l'appartement pour finir leur conversation. Ma curiosité prend le dessus; je décide de regarder discrètement à travers l'oeilleton la tête des deux locuteurs. Éclairés par la lumière jaunâtre du plafonnier ne tenant plus qu'à un fil, mon voisin et un autre homme causent comme si de rien n'était. Le sujet de la conversation m'échappe jusqu'à ce que mon voisin se penche sur sa porte avec un air interrogatif. J'émets alors la supposition que celui-ci ne peut pas rentrer chez lui et que son congénère a embrassé la carrière de serrurier. Ma curiosité satisfaite, je peux retourner voir la suite du reportage sur les élections américaines. Un certain temps s'écoule, quand soudain le bruit agressif et strident de ma sonnette retentit. Vite, c'est peut-être mon prince charmant qui vient d'un royaume lointain pour me déclarer sa flamme. Où est ma robe, mes pantoufles de vair? Du parfum, un peu de mascara, rouge à lèvre, un coup de brosse dans les cheveux, mes plus beaux bijoux, espérons qu'il ne se soit pas impatienté et qu'il ne soit pas reparti. J'ouvre le coeur battant à la chamade mais, ô rage, ô désespoir, que ne vois-je apparaître: mon voisin. La robe redevint polaire grise, les pantoufles tongs trop grandes et la coiffure genre sortie du lit.
« Hola!
— Hola!
— "Long monologue en espagnol incompréhensible".
— Si,si»
Le voisin, tient une carte bancaire, examine ma serrure et me fait quelques remarques auxquelles je réponds en souriant, puis décidant de sortir de mon rôle d'idiote ahurie je décide de lui demander s'il a besoin de quelque chose pour l'aider à ouvrir sa porte. Je tente la chose en espagnol mais aucun mot ne parvient jusqu'à mon cerveau. La tentative en allemand n'aura pas plus de succès. L'anglais prend alors le dessus et j'ose un:
« Do you need something, like a knife? »
Le voisin parle anglais et m'explique enfin ce qu'il est en train de faire. Il regarde à quel niveau de la porte se trouve la pêne (j'avoue, j'ai cherché le mot sur le net), afin de passer sa carte à travers la fente de la porte et permettre ainsi l'ouverture de cette dernière.
Quelques explications s'imposent pour le lecteur soucieux de comprendre que vous êtes:
Les portes des appartements n'ont pas de poignée à l'extérieur. Il est donc impossible de les ouvrir sans clef même si elles ne sont pas verrouillées.
Je laisse le cambrioleur amateur vaquer à ses occupations quand soudain un grand cri me ramène vers l'entrée. Mon voisin tout fou de joie va enfin pouvoir rentrer chez lui. Il me remercie et nous discutons cinq minutes sur le pas de porte. Suite à son étonnement d'entendre le journal télévisé en français, dans mon appartement, alors que lui ne peut pas le voir en allemand, je lui explique qu'il est possible de regarder la télévision sur Internet! Présentations faites, nous nous souhaitons un "good night" respectif et regagnons nos pénates.

A partir d'aujourd'hui, deux choses sont sûres:
-Si un jour j'oublie ma clef à l'intérieur de l'appartement (certains doivent d'ailleurs trouver bizarre que ça ne me soit pas encore arrivé) j'ai toujours la possibilité d'utiliser ma carte de crédit.
-Si mon voisin veut venir boire un coup chez moi, il n'aura pas besoin que je sois là pour lui ouvrir!

jeudi 16 octobre 2008

La Cucaracha

Appelée aussi cockroach en anglais ou tout simplement cafard, blatte ou cancrelat en français cet insecte a le malheureux désavantage de répugner toute personne qui le regarde.

L'histoire qui va suivre est tirée d'une histoire vraie. Les noms des personnes ont été modifiés afin de respecter leur anonymat.

Un jeudi matin d'octobre comme tant d'autres, cours de soutien, sept petits sixièmes boivent les paroles de leur professeur de mathématiques: Madame Entomophobe (enfin, en dehors de ceux qui tombent de leur chaise en se faisant mal au coude, ceux qui défont le bracelet brésilien de leur cheville et ceux qui se prennent pour Santana et font semblant de gratter les cordes de leur guitare invisible).
Juanita vient de passer au tableau et retourne s'asseoir à sa place, quand tout à coup, elle se met à hurler et sauter partout. Étonnement de ses camarades de classe et de son professeur.
« Que se passe-t-il Juanita? s'inquiète ce dernier.
— Una cucaracha, una cucaracha! »
Tous les élèves se lèvent pour voir le mystérieux animal.
Le professeur d'un ton autoritaire:
« Bon, tout le monde a déjà vu une cucaracha alors on se rassoit.
— Il faut la tuer, recommande Miguelito.
— Cet animal ne t'a rien fait, s'insurge le professeur, alors pourquoi veux-tu lui faire du mal?
— C'est pas la petite bête qui va manger la grosse, lance un autre élève, répétant, sans doute, ce que ses parents lui ont déjà dit cent fois. »
Le cours reprend.
« Est-ce qu'une frite de 0,08m de long ça existe? questionne le professeur.
— Non! répond Juanita.»
A ce moment là, Juanito soulève son énorme sac de terre et le pose sur ses genoux.
— Que fais-tu Juanito? demande le professeur.
— Ben, la cucaracha elle arrive le long du mur et elle va rentrer dans mon cartable.
— Pose le sur ta table, Juanito s'exécute. Alors, on continue, pourquoi ça n'existe pas Juanita?
— Parce que c'est trop grand pour une frite.»
Au fur et à mesure de la conversation le détestable animal s'avance sous le tableau, en longeant le mur. Le professeur slalome pour éviter de l'écraser, tout en essayant de ne pas hurler, de garder son calme et de poursuivre, le plus naturellement du monde, la discussion avec ses élèves. Tous les yeux sont fixés sur l'immonde créature qui continue sa progression vers le mur suivant.
« Combien fait 0,08m si tu convertis en cm, Juanito? poursuit le courageux professeur.»
...Lonnnnnnnnnnngue réflexion de Juanito.
Pendant ce temps, Miguelito passe sur la chaise située à sa droite. L'enseignante décide de ne pas relever et s'obstine à poursuivre la leçon.
« On va faire un tableau de conversion. Que mettez-vous après les mètres?
— Ha! Elle est dans mon cartable, s'écrit Miguelito vert de peur.
— Elle n'est pas dans ton cartable, elle est sous ton cartable. Il est pendu à la chaise ton cartable, elle ne va pas grimper dessus, dit le professeur commençant à perdre patience.»
Voyant Miguelito au bord de l'évanouissement, le professeur décide de prendre les choses en main.
« Bon je vais la mettre dehors et après on reprend l'exercice parce qu'on va pas y passer la journée sur cet exercice.»
Madame Entomophobe s'équipe alors d'une page de cahier, s'avance précautionneusement vers l'animal perturbateur et tente de faire subrepticement glisser sa feuille en dessous de l'insecte.
Ce dernier, ne le voyant pas du même oeil, fait demi-tour et refuse le voyage en tapis volant offert par l'enseignante. Après plusieurs essais infructueux, se refusant à écraser la pauvre bête malgré les cris stridents et les demandes pressantes de certains élèves, Madame Entomophobe choisi de donner sa chance à Pablito qui, depuis cinq minutes, raconte à ses camarades que lui il les attrape par les antennes!
« Bon, vas-y Pablito, montre nous comment tu fais, supplie le professeur »
Sous les yeux émerveillés et effrayés des sept spectateurs, Pablito attrape une antenne. Le cafard se débat, Pablito lâche prise, sursaut de la classe entière. Nouvelle tentative, ça y est, le monstre pend par une antenne entre l'index et le pouce du jeune héros. Bras tendu en avant, celui-ci se dirige vers la fenêtre, la foule s'écartant sur son passage comme par enchantement, et libère la fameuse cucaracha de son emprise.
« Madame, elle rampe sur le rebord, elle va rerentrer! prévient Pablito.
— Ferme la fenêtre, ferme la fenêtre, s'empresse d'ordonner le professeur à bout de nerf. »
Les élèves peuvent retourner à leur place, l'excitation du moment redescend et le professeur enchaîne:
« Donc après les mètres, nous avons...
— les décimètres, puis les centimètres continuent en coeur les élèves.
— Très bien, et donc quand je place 0,08 mètres dans le tableau, l'enseignante place les 3 chiffres dans les colonnes adéquates, on trouve combien de centimètres?
— 8 centimètres
— Et donc est-ce qu'elle existe cette frite? conclut le professeur en mimant avec ses doigts un espacement d'environ 8 centimètres.
— Oui !!!!!!!!!!! S'étonnent les sept travailleurs.»
Sur ce, la sonnerie retenti et libère les valeureux survivants de cette épopée fantastique.

Épilogue

Jamais l'activité sur la frite de 0,08 mètres de long ne m'avait pris autant de temps à l'expliquer. Et c'est dans ces moments là que l'on sort de classe en souriant et en se disant: il mettrait quoi dans son rapport l'inspecteur s'il était venu ce jour là?
"Bonne activité sur la frite, bien menée quoiqu'un peu longue! Professeur soucieux de la sauvegarde de ses élèves et de leur autonomie face aux épreuves de la vie"
Ben voilà, le boulot est fait, messieurs et mesdames les inspecteurs. Ce texte est libre de droit et vous pouvez vous en servir pour vos futurs retours d'inspection, si jamais ce cas là se présente à vous un jour!

mardi 14 octobre 2008

Un gran fin de semana en Madrid: Dimanche madrilène (Suite et Fin)

Après une longue pause réparatrice pour mes jambes, je choisis d'aller faire un tour du côté du Parque del Retiro où se concentre la plupart des musées de la ville. J'attrape le métro derrière le théâtre royal, station Opéra, et refait surface au niveau de la Banco de España (Rond point de Cibeles pour ceux qui ont une bonne mémoire). Je descends le Paseo del Prado, longue avenue coupée en deux par un trottoir arboré, sur lequel l'exposition temporaire d'un photographe espagnol distrait le promeneur. L'heure du repas étant bien avancée, je déniche un petit restaurant à Tapas, sur une place à proximité des musées, nommé La Plateria del Museo. Tous les plats exposés donnent envie mais impossible de leur faire correspondre les noms écrits sur la carte! J'opte alors pour un pan con tomate et aceite de oliva, accompagné d'un nom alléchant de jambon ibérique. Le tout s'avère délicieux et me redonne assez d'énergie pour poursuivre mon escapade.

Projetant de faire les musées plus tard dans la soirée afin de profiter un maximum de l'après-midi ensoleillée, je me dirige vers le Parque del Retiro plus à l'est. Je croise alors quelques joueurs de tennis tentant désespérément d'imiter leur Rafaël national et moult promeneurs, rollers et autres skaters déambulant le long des multiples allées sinueuses du parc. Une roseraie, toute faite de grâce, offre les quelques magnifiques spécimens floraux de fin de saison qui lui restent, aux yeux des passants. Je continue en direction du Palacio de Cristal, gigantesque verrière se reflétant dans l'eau d'un petit bassin où quelques canards distraient les badauds. Au loin, un bruit sourd de tambours, qui me rappelle les soirées étudiantes de Pech-David, capte mon attention et m'attire vers lui.

Le bruit s'intensifie au fur et à mesure de ma progression à l'ombre des chênes et des châtaigniers. Je passe une bute et s'affiche alors devant moi un spectacle tout à fait étonnant. Plusieurs dizaines de Christophe Colomb en herbe naviguent aux cotés de leur belle, dans de petites barques bleues, sur un bassin artificiel attifé de mille statues, sculptures, et autres ornementations. Sur les rives, de nombreux couples profitent de la chaleur de ce dimanche après-midi propice aux siestes en amoureux et aux minauderies. A côté, au centre de l'immense monument d'Alfonso XII, quatre percussionnistes africains présentent un spectacle de qualité aux jeunes étudiants en week-end, tandis que jongleurs, musiciens et autres artistes peaufinent leurs numéros sur les pelouses alentours. Je farniente un petit peu dans les parages avant de prendre le métro à Ibiza, qui me conduit après deux changements à la Estaciòn de Atocha.

Cette gare prisonnière du passé mais moderne à la fois, renferme un jardin tropical protégé par une splendide verrière, mettant en valeur ses murs de brique orangés et offrant ainsi un espace de détente exotique aux voyageurs en partance (qui ne doivent plus vouloir partir tellement le lieu est agréable). L'extérieur de la gare n'a rien à jalouser à l'intérieur. Quelques photos, puis je traverse la rue et trouve porte close au Centro de Arte Reina Sofia. Je m'active alors, à remonter le long du Real Jardin Botànico, pour ne pas arriver trop tard au Museo del Prado. Tickets en main, je rentre dans le bel édifice consacré à la peinture européenne du 12ème au 19ème siècle. La fatigue n'aidant pas, j'erre à travers les trop nombreuses galeries couvertes de représentations de telle ou telle tête couronnée, natures mortes, personnages bibliques et scènes mortuaires, sans vraiment m'attarder sur les détails des chefs d'oeuvres (Un exemple parlant de titre d'une toile: "Portrait d'un nain tenant un volume sur ses genoux" !!!). Pour donner un but à mes déambulations désordonnées, je cherche un ou deux titres connus de mon insignifiante culture artistique, sans succès. Une petite heure me suffira amplement pour me faire une idée de l'exposition mais dehors le soleil ne m'a pas attendu et le crépuscule a déjà assombri une partie de la ville.

S'en suit un long moment passé à dénicher un nouvel emplacement pour mon carrosse (fin de week-end oblige) et me voilà de retour à mon hôtel où m'attendent, patiemment pour manger, mes collègues venus des quatre coins de la péninsule: Valence, Alicante, Barcelone, Bilbao, Ibiza, Porto, Lisbonne (Que de noms qui font rêver!). Le repas est simple mais bon, les conversations tournent autour de l'enseignement et après un café à 2€50 nous décidons d'aller nous coucher, pour être apte, le lendemain, à suivre, avec attention, les discours de l'inspectrice générale à propos de "l'évaluation et la notation en second cycle: tradition et nouvelle contextualisation".

dimanche 12 octobre 2008

Un gran fin de semana en Madrid: Dimanche madrilène (Début)

En dépit de la rusticité de la chambre, le sommeil a été réparateur et le petit rayon de soleil filtrant à travers les rideaux m'offre un réveil en douceur, tout en m'annonçant une belle journée en perspective.
A ma sortie de l'immeuble, la lumière commence tout juste à réchauffer la rue encore endormie qui me mène jusqu'à la Gran Via. Un homme, encore grisé par l'alcool bu la veille, décide de m'accompagner. Tout en me racontant qu'il vient des Asturies, il me montre sa casquette et tente de capter mon attention en me parlant d'une vague course cycliste. Mon espagnol n'étant pas encore 100% opératoire le dimanche matin, je lui suggère d'aller trouver meilleure compagnie un peu plus loin. Arrivée à la Gran Via, la densité humaine se fait plus grande et oh! surprise! une course de vélocipèdes matinaux empêche les gens de traverser. Quelques photos pour Papa et je reprends ma route jusqu'à l'Hôtel Europa.

Lustres prétentieux et carrelage marbré, la différence de standing avec mon dortoir précédent est sans appel. Le portier monte ma valise dans une chambre cinq fois plus grande que la précédente et avec tout le confort en prime. Il ne me reste plus qu'à espérer que les repas soient du même acabit. En plus des qualités citées plus haut, l'établissement luxueux a l'avantage d'être située à côté de la Plaza del Sol, elle même épicentre de Madrid. Une page de mon guide me conseille fortement un café-boulangerie, au coin de la place déjà bondée de monde. Appelé La Mallorquina, cet établissement propose un nombre incroyable de pâtisseries en tout genre que l'on déguste accompagnées d'un café et d'un jus d'orange. Le plus difficile est de se frayer un chemin jusqu'au comptoir et de pouvoir s'accouder entre deux madrilènes taillant la bavette. Le ventre bien rempli et le sourire jusqu'aux oreilles, je quitte les lieux en me félicitant d'avoir suivi les recommandations de l'ouvrage hispanique.

Et maintenant, tant de photos et d'endroits multiplement étoilés décrits sur mon guide, par où commencer la visite? La Plaza Mayor est à quelques centaines de mètres, si je suis la calle du même nom. J'avance d'un pas motivé à travers la rue étroite bordée d'immeubles anciens aux couleurs chaudes. Je monte quelques marches et passe sous une porte-cochère, pour arriver sur l'immense esplanade, au centre de laquelle trône une statue de je ne sais quel valeureux cavalier. Tout autour de la place, un bâtiment, aux peintures rosées, orné de tourelles pointues, offre l'ombre de ses arcades aux numismates dominicaux et autres collectionneurs en tout genre. Un petit tour pour vérifier si certains d'entre eux n'auraient pas une vieille carte téléphonique à l'effigie de Miguel Indurain et je reprends mon chemin vers l'ouest.

Quelques minutes plus tard sur la Plaza de Armeria, je ne peux m'empêcher d'avoir une pensée émue pour Aurore. En face de moi, le magnifique Palais royal trône de toute sa majesté, ses pierres blanches étincelantes sous un ciel presque bleu marine. Une longue file de lecteurs de Voici, Gala, et autres magasines people, attendent patiemment leur tour pour visiter ce chef d'oeuvre du romantisme, en espérant secrètement voir apparaître un roi, une reine ou même un prince à l'une des centaines de fenêtres ornant le prestigieux édifice. Je me contente de quelques photos extérieures pour ramener une preuve à cette chère Aurore et pour lui permettre de crâner auprès de ses copines de lecture, en leur montrant qu'elle connaît quelqu'un qui a vu le palais en vrai!

Je m'aventure ensuite toujours vers l'ouest pour atteindre le pont de Segovia marqué d'une étoile sur mon guide. Les touristes se font de moins en moins nombreux et dans un fossé, au détour d'une rue, un sac à main jeté à la vas-vite parle de lui-même sur l'ambiance du quartier. Espacés de quelques dizaines de mètres, une demi-douzaine d'hommes pas tibulaires mais presque, attendent la venue d'on ne sait qui. Mon passage dans le coin semble les intriguer. Un, se trouvant en amont fait signe à un autre en aval. Ce dernier se dirige vers moi alors que j'essaye de ne pas céder à la panique. Avec soulagement, je comprends qu'il tente de me refourguer quelques marchandises pas trop légales que je refuse gentiment par soucis d'économie. Plus loin, sous le fameux pont, coule une rivière à moitié asséchée, qui ne m'invite pas à y tremper les pieds. Je décide donc de relier la station de métro la plus proche afin de retrouver un coin plus propice à l'activité touristique.

La rame, prise à la Puerta del Angel, me dépose à la Plaza de España. Je fais le tour d'un petit marché d'artisanat Amérique du sud, prend le portrait de moi-même devant la statue, envahie de photographes amateurs, de Don Quichotte et Sancho Panza et décide d'aller m'asseoir sur les bancs des jardins de Sabatini qui font dos au Palais royal. Lieu propice à la flânerie et à la lecture, je m'allonge sur un banc de pierre et en profite pour planifier la suite de ma journée.

Un gran fin de semana en Madrid: Arrivée à Madrid

L'arrivée sur Madrid a donc lieu en fin d'après-midi. Tout d'un coup la circulation automobile se fait plus dense. Les routes s'élargissent et les panneaux écrits en espagnol deviennent de plus en plus nombreux. Il va falloir être vigilante, si je ne veux pas passer la nuit à chercher mon auberge. Vu le peu de possibilités de m'arrêter pour consulter le plan, je suis, au feeling, les noms de panneaux qui semblent me dire quelque chose et fais confiance à mon sens inné de l'orientation. Mon entrée dans la ville se faisant au sud-est, j'en déduis qu'en suivant une direction nord-ouest je devrais, tôt ou tard, tomber nez à nez avec le centre ville!

Des immeubles et des monuments de plus en plus grands, hauts et beaux font leur apparition. Je sens que j'approche. Il faudrait que je me gare mais comment faire. Le flot incessant des voitures autour m'emporte comme un poisson dans l'eau d'un torrent. Impossible de m'arrêter. Je me décale sur la gauche, évite une voiture qui sort d'un parking et m'engage dans une petite ruelle bouchée. Parfait, vite un nom de rue, je vais pouvoir sortir la carte et regarder où je me trouve. Calle del Principe! Quel talent!!! Je suis à environ 200 mètres de la Plaza de la Puerta del Sol où se trouve mon deuxième hôtel pour dimanche soir. Sachant que l'auberge se trouve à environ 500 mètres de ce dernier, je pense que ceux qui disent que les femmes n'ont pas le sens de l'orientation peuvent déjà faire leur Mea culpa!

Repérage effectué, il reste toujours la question du garage de la Clio! Impossible de s'arrêter dans les rues, je décide donc d'un itinéraire à suivre pour aller au parking souterrain le plus proche. Je patiente calmement dans les embouteillages et arrivée au feu freinant le trafic, un policier m'indique de tourner à gauche. Bien sûr je souhaitais aller tout droit! Solution de secours, je vais refaire un tour de pâté de maison pour rejoindre le fameux parking. Je retombe sur une avenue déjà empruntée et décide de continuer jusqu'au rond point de la Plaza de Cibeles. Là je sais qu'en prenant à gauche, comme tout à l'heure, je vais pouvoir atteindre mon but. Arrivée au fameux giratoire, un autre gentil bonhomme en costume bleu me signale à coup de sifflet qu'il n'est plus possible de tourner à gauche! Il se moque de moi ou quoi, je viens de le faire il y a à peine une demi heure! Mais, en effet, sur le trottoir d'en face le tournage de je ne sais quelle publicité ou émission, dont deux jumelles tiennent les rôles principaux, empêche toute circulation. Me voilà embarquée sur une immense avenue, en train de m'éloigner dangereusement du centre ville. Impossible de faire demi-tour, l'angoisse m'envahie! Je vais me retrouver en dehors de la ville alors que j'étais à 500m de mon auberge! Tant pis, clignotant à droite, demi-tour en dehors des règles de l'art et quelques coups de klaxons madrilènes plus tard me revoilà sur le droit chemin.

Je vous passe les problèmes de sens unique et les voix de Taxis infranchissables pour vous dire que je ne fus garée qu'environ une heure et demi plus tard!
Valise à la main, me voilà engagée dans la Calle de Hortaleza. Pas besoin d'être né ici pour voir qu'il s'agit du quartier gai et en vogue de Madrid. De nombreux magasins de fringues originales, éclairent la rue de leurs couleurs chatoyantes. Le coin rassemble quelques restaurants bons marché et de nombreuses auberges de jeunesse. Mais la mienne se cache et reste introuvable. Je remonte la rue, la redescend, la remonte... Mais elle doit être là normalement la Calle Pérez Galdòs! Au final cette rue indiquée à droite sur mon plan s'avèrera être sur la gauche (Non, ce n'est pas moi qui ne sais pas lire un plan , c'est bien le plan qui était faux)!

Neuf heure du soir, je sonne à la porte de l'auberge. Haut parleur, difficulté de se faire comprendre et de comprendre mon interlocuteur, qui dans sa grande bonté, décide de m'ouvrir quand même, sans plus d'indications. Je pousse la lourde porte en bois et en face de moi se tient un vieil ascenseur comme dans "Le Père-Noël est une ordure". N'ayant aucune indication de l'étage à atteindre, je décide de prendre l'escalier. Arrivée au second étage, une porte entrouverte laisse apparaître un homme qui m'accueille en me disant que "el ascensor funciona"! Les questions administratives réglées et les règles de vie de l'établissement expliquées, mon hôte, ayant ouvert mon passeport à la page du VISA américain, me souhaite un bon séjour dans son meilleur anglais possible.

Ouf, me voilà dans ma chambre de 4 mètres carrée, encore plus petite que celles des tripodes de l'Université Paul Sabatier à Toulouse. Pas de temps à perdre, il faut aller bouger la voiture avant d'aller manger, si je ne veux pas payer plus cher que le mien son logement! Je décide de remonter vers le nord à la recherche de places gratuites pour ensuite prendre le métro. Comme c'est le week-end les parcmètres sont au repos. Place trouvée, je m'assure auprès d'un couple que je suis bien dans mon droit, ne voulant pas finir le séjour à chercher l'adresse de la fourrière. Le métro n'est pas loin et vers 11h j'arrive enfin à m'asseoir à la table d'un petit restaurant situé à 50 mètres de mon dortoir. Mes voisins de table, me voyant galérer avec mon dictionnaire, demandent à la serveuse de me donner un menu en anglais! La fin me tiraillant j'engloutis les plats à vitesse grand V, tout en observant les gens autour de moi. Toutes les possibilités de couples sont représentés. Le lieu est agréable et le repas plutôt bon. Il se fait tard et malgré l'ambiance festive à l'extérieur, je décide de ne pas m'attarder dehors pour la soirée afin de profiter d'un long dimanche le lendemain.

De retour dans la rue sombre de l'auberge, la clef ne veut pas ouvrir la porte d'entrée. Je dois sonner à l'interphone. On me répond de revenir le lendemain car tout est complet!!! Je tente de plaider mon cas à la personne de l'autre côté qui visiblement ne me comprends pas et ne veut pas m'ouvrir. Je m'acharne sur la porte et afin d'éviter de m'entendre tambouriner et gémir toute la nuit, on accepte de me laisser rentrer. Arrivée au deuxième étage j'explique: « — No es possible, la puerta con...» et je montre ma clef en faisant un mouvement de poignet de gauche à droite. On me répond que c'est normal car la clef n'ouvre pas la porte et que c'est le veilleur de nuit qui ouvre à tout le monde toute la nuit! Alors pourquoi m'a-t-on donné une clef pour la porte d'en bas? Et pourquoi ne voulait-il pas m'ouvrir? Ne voulant pas passer la nuit à essayer de comprendre l'incompréhensible, je laisse tomber et me couche dans mon lit glacé, exténuée par toutes les péripéties de la journée.

samedi 11 octobre 2008

Un gran fin de Semana en Madrid: Aranjuez

Quel bonheur d'arriver à vendredi soir et de savoir que je vais passer mes quatre prochaines journées à:
M-A-D-R-I-D!

Vendredi soir: Préparatifs pour le séjour. Recherche sur internet de l'emplacement de l'hôtel réservé par l'AEFE, de l'auberge de jeunesse réservée par mes soins et du Lycée français de Madrid (car accessoirement je pars là-bas pour faire un stage!). Un dernier petit passage sur le site du patrimoine mondial de l'UNESCO (au cas où quelques merveilles se cacheraient dans les alentours) et valise bouclée je m'endors en rêvant à la capitale espagnole.

Samedi matin: Détour par la FNAC. En effet arriver en voiture dans une ville de plus de trois millions d'habitants sans plan n'est peut-être pas une bonne idée. Je ressors du magasin avec un Atlas Michelin des routes d'Espagne au 1:400 000, un guide touristique de Madrid en espagnol et un livre/plan de Madrid de la même collection que celui de Laurent et Céline pour visiter New-York! Équipée de la sorte je prends la route sous un beau soleil d'octobre espagnol.

Je traverse tantôt d'immenses champs cultivés, tantôt des dunes de terre, arides, recouvertes de panneaux solaires; plus loin des champs entiers d'éoliennes et par-ci par-là une chapelle perdue dans le paysage. Sur le bord de la route je rencontre parfois une immense silhouette de taureau noire qui semble clamer haut et fort "Sí, aquí es España".

Après quelques heures de route dans ce paysage si proche de celui des westerns, l'appel du ventre me fait m'arrêter dans un restaurant routier sympathique. Malgré quelques difficultés à lire la carte, mon choix s'arrête sur quelques brochettes annoncées comme une spécialité de la maison. Bon choix qui me permet de reprendre la route assez rapidement. Sans pouvoir échapper à quelques déviations, histoire de me faire perdre du temps, j'arrive à rejoindre mon premier point de chute du voyage, situé à environ une heure au sud de Madrid: Aranjuez.

Voisine et donc dans l'ombre de la belle Tolède, Aranjuez n'en est pas moins qu'une petite ville de conte de fée. Vu le peu de temps que j'ai pour la visiter (par peur d'arriver trop tard à l'auberge de jeunesse de Madrid) je vais à l'essentiel: Iglesia de san antonio, Casa del Labrador et bien sûr Palacio Real. C'est en parcourant les allées des jardins de la ville que l'on comprends qu'un concerto lui soit dédié. Tout n'est que calme et volupté. De multiples fontaines de toute beauté donnent une note de fraîcheur à chaque intersection des multiples allées de ce labyrinthe de verdure.

A proximité, un édifice cerclé de longues arcades baignées par les rayons du soleil enferme une cour tapissée de lavandes et de roses. La promenade est magique et en quittant ces lieux je me promet d'y revenir un jour pour en profiter plus longuement.

vendredi 3 octobre 2008

Un dimanche au bord de la mer (2nde Partie)

Nous voilà donc en train de remonter par l'ouest, le long de la Mar Menor. Les noms des villes sur les panneaux sentent bon le fond de l'Espagne: Los Alcazares, San Javier, San Pedro... Le but cette fois, est d'aller voir le bout de La Manga mais en arrivant par le nord. Nous passons San Pedro del Pinatar pour arriver sur la Calle Del Puerto. Dans les marécages qui longent le chemin, des flamants roses festoient sous les rayons de cette belle fin d'après midi ensoleillée. Comme son nom l'indique la route nous mène jusqu'au port où elle s'arrête pour laisser place au parc régional de las Salinas.

Nous laissons la voiture pour explorer les alentours à pied. Quelques pêcheurs taquinent la friture sur le parapet du port tandis que la plage s'allongeant en direction de La Manga est quasiment déserte. Plantés dans le sable, quelques vieux panneaux délavés tentent d'informer le visiteur qu'il se trouve à l'entrée d'une réserve naturelle. A notre droite un restaurant laisse partir ses dernier clients de la journée. Alors que nous le contournons, la luminosité se fait plus grande. De l'autre côté, le soleil se reflète sur de larges dunes blanches et grises. Voilà la raison du pourquoi de "Las Salinas". Il est là le fameux sel que je n'ai pas su trouver dans mon Mercadona et à la place duquel j'ai pris du Bicarbonato Sodicò (A ne pas essayer sur la viande, car ce n'est pas bon)!

Maintenant, il serait temps d'acheter quelques cartes postales et de plonger quelques doigts de pied dans l'eau avant que l'astre du jour ne se fasse la malle. Après quelques photos à contre jour, pour le blog, nous rebroussons chemin et nous arrêtons sur les plages de San Pedro del Pinatar. San Pedro est une petite station balnéaire, idéale pour le troisième âge. Une longue promenade, jonchée de palmier, part du coeur de la ville et longe la Mar Menor à l'est. De chaque côté de petits escaliers en bois permettent aux fans de Fort Boyard d'aller s'affronter dans la boue dotée de toutes les vertus. Certains en remplissent des fonds de bouteilles pour se les verser dessus alors que d'autres en ramènent des sauts entiers chez eux. Ne souhaitant pas salir mon beau maillot turquoise, nous optons pour une marche pieds nus sur la plage de sable côté ouest. Les vaguelettes qui viennent mourir sur nos orteils ne nous font même pas frissonner tellement la température de l'eau est idéale. Un rare magasin de bric-à-brac expose quelques cartes postales désuètes, du genre danseuse de flamenco avec relief en tissu incrusté dans la photo. Notre choix se porte sur une vue aérienne de la Mar menor, quelques baigneurs couverts de boue et une représentation imagée des principaux lieux touristiques de la Murcie, en se demandant si on les enverra un jour où si elles ornerons à jamais nos albums souvenirs!